PAR MARIE FOULT - PUBLIÉ LE 07/12/2020
Les
radiologues libéraux s'ajoutent à la liste des mécontents du projet de loi de
financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2021). Ils n'ont pas été entendus par
les députés, alors qu'ils demandaient la suppression de deux articles du
Code de la sécu qui permettent toujours au directeur de
l'Assurance-maladie de baisser unilatéralement la valeur des forfaits
techniques IRM et scanner (mesure introduite dans l'article 99 de la LFSS
2017).
Très critiquée, cette disposition
de 2017 avait été suivie d'un protocole triennal sur l'imagerie signé
en 2018 entre la CNAM et la Fédération nationale des médecins radiologues
(FNMR), visant à réaliser 167 millions d'euros d’économies pour la
radiologie. La CNAM et la ministre de la Santé Agnès Buzyn s'étaient alors
engagées à ne plus utiliser cet article 99 et à l'abroger, au plus tard en
2020…
Mais cette abrogation n'ayant
jamais eu lieu, les parlementaires se sont saisis du sujet. Lors de l'examen du
budget de la Sécu au Sénat, trois amendements identiques proposant de
supprimer cette procédure tarifaire ont d'abord été adoptés, malgré l'avis
défavorable du gouvernement. « Le
protocole devait engendrer 207 millions d'euros d'économies sur la période
2018-2020. Mais les résultats en 2018 et 2019 ont été très
décevants : 60 % et 30 % des objectifs respectivement ont été
atteints », a tenté de défendre la ministre déléguée à
l'Autonomie, Brigitte Bourguignon.
Parole de
l'État
Mais lors de la séance du
24 novembre à l'Assemblée, un autre amendement a été défendu et voté par
la majorité… pour rétablir le mécanisme de décote tarifaire de l'article 99. Et
ce malgré le plaidoyer de plusieurs élus de l'opposition, appelant l'État
à « respecter sa
parole » envers les radiologues « en première ligne de la crise
sanitaire », a soutenu le député Thibault Bazin (LR,
Meurthe-et-Moselle), suivi de Philippe Vigier (MoDem, Eure-et-Loir) et de
Joachim Son-Forget (non-inscrits, Français de l'étranger).
« Même si l’on peut regretter
que cette procédure soit dérogatoire au droit commun conventionnel, elle permet
de limiter la hausse importante des dépenses liées aux forfaits
techniques », a justifié le rapporteur général du PLFSS Thomas Mesnier
(LREM, Charente), suivi par le gouvernement. « Le dispositif, que nous voulons maintenir, permet de
conserver un levier d’action sans exclure les négociations », a
assuré la ministre Brigitte Bourguignon, avant que l'amendement ne soit adopté,
rétablissant ainsi le mécanisme honni par les radiologues…
Épée de
Damoclès
Principale concernée, la FNMR continue de réclamer la suppression de
l'article 99, arguant que « le
total des économies sur les trois années du protocole se monte à environ
300 millions d'euros, dont 200 millions pour les seuls mois du
premier confinement ». Las, selon la Fédération des
radiologues, ces économies n'entrent pas dans le cadre du protocole pour la
CNAM, car elles s'expliquent par la crise sanitaire (et non par un effort de la
profession). La preuve, pour la FNMR, que « la maîtrise comptable est toujours d’actualité ».
De son côté, la CSMF souligne que
cette mesure est « la
négation du dialogue conventionnel ». « Cet article 99 est une épée
de Damoclès qui pèse (par son principe) sur toutes les spécialités médicales, y
compris la médecine générale », juge la centrale du
Dr Jean-Paul Ortiz. Qui appelle à l'union de tous les praticiens libéraux,
généralistes comme spécialistes, pour imposer à l’État la suppression de
l’article 99. « Son
maintien est le symbole d’une sanction de l’État vis-à-vis de la médecine
libérale ».